Une Église en malaise et fatiguée : une dépendance vitale


Ac 9, 26-31 – Ps 21 (22) – 1 Jn 3, 18-24 – Jn 15, 1-8 

5e Dimanche de Pâques (B)

Toutes les réformes actuelles de l’Église, l’ensemble de grands chantiers entrepris ou en vue, les appels à la conversion non seulement des croyants, mais aussi de la structure ecclésiale indiquent une extrême fatigue et l’état d’une Église en profond malaise. Devant de tels constats, l’interpellation du Christ peut nous redonner Espérance à condition qu’elle nous engage, qu’elle nous bouge, qu’elle nous dérange. En effet, tout baptisé qui n’est pas connecté au Christ, qui ne se situe pas dans une dépendance à Lui est comparable à un bois mort. Toute communauté chrétienne qui ne privilégie pas la relation au Christ devient stérile et se réduit à une organisation civile. Ainsi, toutes les crises actuelles de la foi, celles de la vie spirituelle, celles de la vie de l’Église dans son essence même et dans sa mission, etc., relèvent sans aucun doute d’une perte de connexion au Christ.

« Quiconque ne demeure pas dans une dépendance au Christ devient stérile ! » Voilà l’essentiel de ce que l’on peut tirer de l’Évangile de ce 5e dimanche de Pâques (B). Autrement dit, nous avons besoin d’appartenir au Christ comme nous le rappelle saint Jean. Cependant, non « pas en paroles ni par des discours, mais par des actes et en vérité. » (1 Jn 3, 18) Pour ce faire, il y a deux exigences : (a) Croire en Jésus et (b) Aimer son prochain (1 Jn 3, 24). Voilà des pistes concrètes et actuelles pour demeurer branchés sur Jésus et être fécond ; pour sortir de notre malaise ainsi que de notre fatigue tant spirituelle personnelle que structurelle et communautaire.

La foi évoquée par saint Jean, c’est-à-dire l’acte de « Croire » est au cœur de la solution aux crises actuelles, car le drame de ce 3e millénaire repose dans le fait que tant d’hommes et de femmes ne croient plus ou pas en Jésus-Christ mort et ressuscité. L’Amour du prochain mentionné par saint Jean constitue la seconde solution urgente pour faire face au malaise et à la fatigue de l’Église. En effet, un autre drame de ce temps se trouve dans le fait que notre monde est empesté de haine ; de manque d’amour se traduisant par des barrières à plusieurs frontières étatiques, par des politiques d’isolationnisme, par des conflits de toutes sortes (ethniques, économiques…), par toute sorte de discrimination, par tant de violence (conjugale, infantile, psychologique, verbale, numérique). Pire encore, nous chrétiens (e), nous n’aimons pas assez, nous n’aimons pas jusqu’au bout. Cela se traduit par un repliement sur nos groupes d’appartenance, sur nos communautés religieuses locales ; par notre méfiance vis-à-vis des chrétiens d’ailleurs et voire même des vocations d’ailleurs ; par des guerres de clochers ou de spiritualités ; par des critiques non charitables de nos leaders ou d’autres groupes qui ne pensent pas comme nous ; par une certaine violence numérique sur les réseaux sociaux ; par une peur de la différence ; par une lutte féroce et acharnée pour préserver nos conforts et vivre dans l’illusion du passé ; par une perte du sens de la catholicité de l’Église et de son essence missionnaire. En ce sens, le pape François nous rappelle que « Seul l’amour nous sauvera », car l’amour véritable en Jésus-Christ rend fécond. Cela doit donc nous pousser à nous questionner, en vérité et avec courage, sur l’état de l’Église chez nous : l’absence actuelle de multiplication de l’Église à l’instar de celle décrite dans les Actes des Apôtres (Ac 9, 31), la baisse de la pratique religieuse chez nous, la déresponsabilisation des chrétiens (e) pour vitalité des communautés locales, etc., ne sont-elles pas des signes de l’infécondité de notre vie chrétienne ?

Nous sommes toutes et tous appelés à prendre conscience que chaque action ou inaction personnelle a une répercussion sur l’ensemble de l’Église, sur le corps entier. Ainsi donc, toute conversion personnelle conduit a une celle de l’Église ; toute responsabilisation et tout engagement personnel au nom de son baptême conduit à la vitalité et à la fécondité de l’Église ; tout acte personnel de Foi, d’Espérance et de Charité conduit à sortir l’Église de son malaise actuel et de sa fatigue structurelle. De fait, cette fatigue actuelle n’est rien d’autre que celle de la Foi, d’une perte d’Espérance, d’une absence de Charité qui se traduisent dans la fatigue structurelle de l’Église et ne permettent pas aux chrétiens (e) de porter de fruits. Cette infécondité n’est rien d’autre que celle de chacun de nous qui sommes toutes et tous appelés à retrouver une connexion au Christ qui affirme : « en dehors de moi, vous ne pouvez rien faire. » (Jn 15, 7)

Le Christ mort et ressuscité nous invite à demeurer en Lui, à croire en Lui, à l’aimer en nous aimant mutuellement, à ne vivre que de Lui ; car il n’y a que Lui qui puisse faire vivre son Église. Il est le seul chemin et la seule perte qui conduit à la vie éternelle que nous sommes appelés à anticiper dès maintenant à travers toutes les sphères de nos vies. Osons faire confiance au ressuscité et nous abandonner en Lui. C’est ainsi qu’à l’exemple de Saul, nous pourrons parler au monde actuel avec assurance, mais au Nom de Jésus (Ac 6, 29) ; que nous pourrons être féconds et sortir de notre malaise, de notre fatigue ecclésiale.

© Ab. Léandre Syrieix.


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