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Depuis que je t’ai rencontré, je n’imagine plus ma vie sans toi, pourtant il m’arrive d’être loin de toi, de t’oublier pendant quelques instants. Quand cela m’arrive, je prends davantage conscience du solide lien qui nous unit.
Avec toi, je partage mon existence, non pas parce que je suis maladivement dépendant de toi, mais à cause de l’amour réciproque qui nous habite. Ma respiration n’est rien d’autre que notre amour. Comment puis-je alors cesser de t’aimer ? Manifestement, cela supposerait que je ne vis plus puisque l’absence de respiration, l’absence d’amour, c’est l’absence de vie, c’est la mort.
L’amour qui nous lie me garde donc en vie, mais comment se fait-il qu’il m’arrive souvent de t’oublier au cours de mes journées, au cœur de mes occupations ? Je prends acte de ce fait le soir, lorsque nous nous parlons avant que je ne m’endorme, lorsque nous faisons le bilan de la journée. En effet, t’oublier à certains instants de ma journée traduit mon imperfection, le mystère de ce que je t’aime malgré que je ne sois pas entièrement présent à toi.
Finalement, t’oublier à certains moments de ma journée ne signifie pas que je ne t’aime plus, que je ne vis plus, mais au contraire que tu as du prix à mes yeux puisque cela ne dure qu’un instant. Lorsque je te revois le soir, je savoure davantage ta présence et ta compagnie.
En fait, ton amour ne me quitte pas, car il m’accompagne tout au long de mes journées, il me donne la vie, et tu sais bien que mon amour est également en permanence présent, que je t’aime intensément, même inconsciemment.
Ton amour me fait grandir et régule mes journées, elle est le moteur de ma vie, elle est ma vie. Par exemple, il m’arrive au cours de mes journées, au cœur de mes occupations, de rencontrer des épreuves, ou encore de vivre des moments de colère dans lesquels je me submerge jusqu’à ce que le regard tourné vers ton amour, vers la vie, même inconsciemment, me relève de ces situations.
Comment est-ce possible que le simple fait de penser à ton amour fasse de moi un être en vie, un être différent, une personne debout, un être attentif à ce qui se passe autour de lui, ouvert à l’autre et au monde ? De toute évidence, il n’y a rien à comprendre, car aucun mot ne peut traduire ce fait, ce vécu intérieur.
Cet amour qui nous lie me révèle chaque jour quelque chose de nouveau chez moi, sur toi, sur notre avenir. Nul ne peut saisir ce souffle qui nous habite, cette flamme qui brûle en nous, s’il ne le vit ni ne l’expérimente pas ; car nous vivons de cet amour sans plus vivre en nous.
Ton amour me fait mourir au monde et vivre uniquement de toi, pourtant il m’arrive assez souvent de ne point être parfait. Comment l’imperfection et la perfection peuvent-elles ensemble, subsister en moi ? En fait, je suis tellement imparfait à un tel point qu’il n’y a que ton amour qui fait de moi un être debout, un être capable d’aimer puisque cet amour est plus fort que tout.
Quand je te dis, « je t’aime », qu’est ce que je veux exactement signifier ? En réalité, je ne sais vraiment pas, car tout ce que je sais c’est que « je t’aime » et le reste n’a point d’importance. Aucune parole ne me permet de le dire, de le déployer vu que cela ne s’explique pas. Te montrer mon amour est une vaine entreprise dans la mesure où tout ce que je puis faire ne pourra jamais suffire à l’exprimer. Il suffit que je vive pour que l’amour soit vu et saisit.
L’idée de « respiration » me revient à l’esprit. Il n’y a qu’elle qui dise ou montre mieux, pour l’instant du moins, cet amour, le mien. Mais, qu’est-ce que respirer ? Qu’est-ce que la respiration ? Comment l’expliquer si ce n’est que le faire, respirer, t’aimer et vivre. Si je ne respire pas, je ne vis plus, donc je ne puis t’aimer vu que ma respiration n’est rien d’autre que mon amour pour toi.
Quand j’arrêterai de respirer, cela signifierait que je ne vivrai plus, je ne serai plus alors conscient de cet amour pour toi ; non point que je cesserai de t’aimer. J’ai la certitude que même en arrêtant de respirer, sous une autre posture, c’est-à-dire du point de vue l’au-delà, je t’aimerai à l’infini, d’une manière qui n’est présentement pas à mon pouvoir d’exprimer.
Or, je crois en la vie à venir. Et de ce fait, de la posture de l’au-delà, je continuerai à vivre, à respirer, et donc à t’aimer. La mort, entendue comme le passage de cette vie vers celle à venir, et non comme « la mort éternelle », m’ouvrira la porte d’une vie bienheureuse et apparente avec toi. Ainsi, tant que je vivrai, je t’aimerai parce que je vivrai sans plus vivre en moi, ton amour me fera vivre.
© Léandre Syrieix.
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