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Du latin acolythus, ce terme a pour sens premier « serviteur clérical ». Ainsi, dans la religion catholique par exemple, l’acolyte est le servant de l’autel, et son ministère ou service constitue par la même occasion une des étapes dans la formation sacerdotale telle que reformée par le Pape Paul VI dans sa Lettre Apostolique Ministeria quaedam sous forme de Motu proprio[1].
Toutefois, plusieurs emplois de ce terme dans la langue française peuvent lui conférer un autre sens religieux à l’instar de « complice ». En effet, le complice est une personne avec qui on est de connivence dans tous les sens du mot.
Alors, « être de connivence avec le Christ » à travers l’acolytat crée un déplacement intérieur. En ce sens, demander à faire le rite de l’acolytat peut revenir à se poser la question suivante, suis-je prêt à être de connivence avec le Christ au cœur du monde ? Autrement dit, où suis-je dans ma relation avec lui et mes semblables ? En somme, l’acolyte est complice du Christ dans tous les gestes qu’il pose envers les malades, les pauvres, dans le service rendu aux plus nécessiteux, dans la lutte contre les injustices sociales, dans la solidarité avec les personnes qui dérangent, celles avec qui l’on ne partage pas les opinions et les aspirations qu’elles soient religieuses, politiques, etc. L’acolytat ne se limite donc pas au service de l’autel dans le cadre d’une célébration religieuse, mais cela porte sur tous les stades de la vie humaine. L’acolyte est appelé au service de l’autel qui est de fait la table de toutes les réalités des personnes qui l’entourent.
Un autre terme québécois, « chum », éclaire davantage l’acolytat. Manifestement, ce mot dans le langage familier québécois renvoie à ami (e), copain ou copine, compagnon, conjoint (e), petit (e) ami (e), etc. Mais limitons-nous aux deux premiers, c’est-à-dire « ami et copain ». Le Christ dit à ses Apôtres : « Je ne vous appelle plus serviteurs, car le serviteur ne sait pas ce que fait son maître ; je vous appelle mes amis, car tout ce que j’ai entendu de mon Père, je vous l’ai fait connaître. (Jn 15, 15) Ainsi, l’acolyte est le chum, l’ami du Christ et cela l’engage à plusieurs niveaux : à la solidarité, au partage, à la proximité, etc. Aussi, « les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses des hommes de ce temps, des pauvres surtout et de tous ceux qui souffrent, sont aussi les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses » (GS 1) de l’acolyte. Par ailleurs, l’acolytat ne fait pas devenir chum ou ami du Christ dans la mesure où ce n’est pas une fin en soi, mais c’est parce que l’on est chum ou ami du Christ que l’on devient son acolyte. Lorsque le chum est malade, ne le visite-t-on pas ? Lorsqu’il traverse des moments difficiles, ne l’accompagne-t-on en étant présent, en exprimant de la proximité et de l’amitié ? Être acolyte c’est donc être chum des malades, des blessés de la vie, des marginalisés, des personnes seules ou de celles jugées, de celles que personne ne visite.
L’autre sens de chum, “copain” peut être compris de la manière suivante, copain = “co” (partager) – “pain” (nourriture) ; personne avec qui l’on “coupe” le “pain” (jeu de mots). Or, dans nos mœurs, on ne coupe ou ne partage pas le pain avec n’importe qui parce que c’est un geste plein de sens. Cet acte de couper, de partager renvoie au don de soi, c’est une façon d’entrer en relation. À chaque fois que le Christ rompt le pain, c’est pour se donner, c’est pour communiquer quelque chose de lui, c’est pour entrer en relation ou introduire l’autre dans sa relation filiale avec le Père. Plusieurs références aux Écritures saintes soulignent ce fait. Par exemple, au cours du repas chez Lévi, le collecteur d’impôts (Mc 2, 13-17), le Christ révèle qu’il y a aussi des personnes honnêtes chez les pharisiens, c’est-à-dire chez des personnes étiquetées, catégorisées, etc. De la même façon, le Christ opère la conversion de Zachée (Lc 19, 1-10) pour signifier sa solidarité avec le genre humain. L’acolyte qui est chum du Christ l’est dans le sens de copain puisqu’à sa suite, il partage et rompt le pain avec l’humanité, avec les hommes et les femmes de toutes conditions, de toutes religions du fait de leur nature humaine, de leur ressemblance au créateur et non pas du fait de leur race, de leurs classes sociales, etc. Être chum ou copain du Christ, c’est rompre le pain avec ceux et celles qui n’ont rien, qui connaissent des atrocités. C’est aussi partager leurs souffrances, avoir un cœur apte à compatir avec leurs joies et leurs peines à la manière du Christ. Autrement dit, c’est être solidaire de l’humanité souffrante, c’est demeurer à son chevet où le Christ s’associe lui-même à ses souffrances.
Le dernier terme, “camarade”, ne doit pas être compris au sens politique ou syndical. En effet, le camarade dans ce contexte désigne une personne avec qui on est compagnon à divers niveaux : jeux, études, profession, etc., mais plus que cela, il y a des liens de familiarité qui ont pris naissance avec cette personne. Alors, l’acolyte est un camarade, un compagnon de jeu, de travail, d’études avec toutes les personnes qui croisent son chemin au quotidien, au cœur de ses occupations, sans barrières sociales, économiques, politiques, religieuses, etc., parce qu’il est ouvert à “TOUS” à l’exemple du Christ qui s’est fait proche de la famille humaine.
Le rite de l’acolytat dans le processus de discernement vocationnel en vue du sacerdoce n’est pas une formalité à remplir ni un état de grâce particulier, mais une suite logique du fait d’ “Être chrétien”, d’une relation véritablement vécue avec le Christ à travers les réalités humaines. L’acolyte est donc un complice, un chum, un camarade du genre humain non pas uniquement à un moment de la vie, mais à tout instant. Demander à faire le rite de l’acolytat, que ce soit pour un laïc ou en vue du ministère ordonné signifie s’inscrire dans cette dynamique d’ “Être chrétien” dans un rapport avec le monde et le Christ, non pas de manière parfaite, mais telle que l’on est avec ses forces et ses faiblesses et comptant toujours sur le secours de la grâce divine pour cheminer et confesser dans la confiance.
© Léandre Syrieix
[1] La traduction de ce terme en français est « de son propre chef ». Ainsi, c’est un document, une bulle pontificale ou une lettre apostolique, signé par le Pontife Romain en son nom propre et qui a une valeur juridique, une autorité au sein de l’Église.
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