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Gn 2, 18-24 – Ps 127 (128) – Hb 2, 9-11 – Mc 10, 2-16 – Messe 27e dimanche Tps. Ord. (B)
Dieu les fit homme et femme […], et tous deux deviendront une seule chair. » (Mc 10, 6-8) Voilà le cœur des textes de la liturgie de la Parole de ce jour alors que tout le pays, l’ensemble des citoyens, croyants et non croyants, célèbre l’Action de grâce. Ce n’est pas une coïncidence si la 1e lecture, tirée du livre de la Genèse, nous ramène à la création, notamment celle des bêtes des champs et tous les oiseaux du ciel, ainsi que celle de la femme. En effet, l’humain et la création sont l’œuvre de Dieu, elles sont voulues par lui et « tout ce qu’ [il] a ainsi créé est bon, et rien n’est à rejeter si on le prend dans l’action de grâce. » (1 Ti 4, 4) Les textes du jour nous suggèrent alors des manières de rendre grâce à Dieu. Toutefois, avant de s’intéresser à la façon de rendre grâce[1], il est essentiel de savoir quels sont nos motifs d’action de grâce.
Étymologiquement, « grâce » vient du latin gratia qui signifie reconnaissance, gratitude. Ainsi, l’« Action de grâce »[2] est le fait de poser un geste de reconnaissance, de gratitude ou de remerciement. Historiquement, à l’« Action de grâce »[3], on remerciait Dieu pour les récoltes, l’alternance heureuse des saisons, etc. Aujourd’hui, pour chacun de nous, quels seraient les motifs d’action de grâce envers Dieu ? Lorsque le poids de la maladie nous accable ; quand, comme parents, nous sommes déçus par un enfant qui ne fait pas les choix que nous aurions espéré ; lorsque nous connaissons des déceptions amoureuses ; lorsque nous faisons l’expérience de l’échec sous toutes ses formes[4] ; quand nous sommes critiqués ou rejetés à cause de nos options politiques, de nos orientations, de nos idées, de nos origines ; lorsque nous sommes mis à l’écart à cause de notre handicap, de notre condition sociale, etc., il peut sembler difficile voire impossible de trouver, au cœur de tant de souffrances, des motifs d’action de grâce. Or Dieu est fidèle, car il ne nous abonne pas et chemine avec nous, à notre rythme, avec patience et amour. Il a toujours eu la préoccupation pour l’humain : « il n’est pas bon que l’homme soit seul. » (Gn 2, 18) Voilà une Bonne Nouvelle pour nous aujourd’hui : Dieu est fidèle dans la vie de chaque humain, peu importe sa situation. Il est un Dieu d’Amour qui se laisse saisir au plus profond de ses entrailles par la condition humaine. Parfois, il suffit de sortir la tête de nos soucis, de tout ce qui nous accable pour percevoir la proximité de Dieu et trouver des motifs d’action de grâce. Nous sommes souvent polarisés sur nos problèmes si bien que nous créons « des conceptions de Dieu »[5] qui ne correspondent guère à ce qu’il est véritablement. Or, même au cœur de notre souffrance, il est possible de trouver des motifs d’action grâce, car être vivant en est un puisque la vie est un don[6] de Dieu. Aussi, nos frères et nos sœurs, nos prochains, sont des motifs d’action de grâce tout comme nos possessions, la nourriture que nous avons quotidiennement, l’accès aux soins de santé, etc.
La 1e lecture nous propose une manière de rendre grâce : l’émerveillement. En effet, après que Dieu façonna la femme et l’amena à l’homme, celui-ci s’émerveilla en disant : « Cette fois-ci, voilà l’os de mes os et la chair de ma chair ! » (Gn 2, 23) N’est-ce pas là une façon de reconnaître la merveille de Dieu. Nous voyons ainsi que rendre grâce à Dieu est possible en se laissant émerveiller par les multiples façons dont il agit dans nos vies, par ses manifestations à travers les personnes que nous côtoyons, par la magnificence de ses œuvres, celle de la création tout-entière.
Dans l’Évangile, Jésus se fâche lorsqu’on empêche les enfants de venir à lui. Ils sont le symbole de ceux et de celles qui n’existent pas, qui sont insignifiants, qui sont marginalisés, abandonnés, abusés, vulnérables, etc. À leur égard, Jésus pose un geste : « il les embrassait et les bénissait en leur imposant les mains. » (Mc 10, 16) Peut-être cette attitude du Christ peut nous inspirer dans nos façons de rendre grâce à Dieu, c’est-à-dire en lui manifestant notre gratitude et notre reconnaissance en l’embrassant. Or embrasser le Christ en guise de remerciement peut revenir à le serrer fort dans nos bras par le biais des plus vulnérables d’entre nous, car c’est en eux qu’il se manifeste. Le Christ se cache dans ce qu’il y a de plus marginalisé sur cette terre[7].
Aujourd’hui, on constate avec désolation que la création est encore plus marginalisée que l’humain à cause de toutes nos actions néfastes sur elle au nom de l’industrie, du développement, de l’économie, etc. Au regard de la situation critique actuelle de l’environnement, quel serait nos motifs d’action de grâce ? Peut-être que son état alarmant peut nous interpeller afin de changer nos attitudes et agissements à son égard, en l’embrassant et en la bénissant à la manière du Christ plutôt qu’en l’asservissant.
L’être humain a une belle fonction sur la terre, celle de louer Dieu et d’aimer. Voilà son bonheur sur la terre. En ce sens, saint François d’Assise est un modèle pour nous aujourd’hui, car par sa vie il nous montre comment embrasser le Christ dans les plus pauvres, dans ce qu’il y a de plus vulnérable, mais aussi il nous indique comment entrer en relation avec toute la création. Demandons lui de nous obtenir du Père l’aptitude à lui rendre grâce sans cesse et d’aimer.
© Léandre Syrieix.
[1] Comment. [2] Les évêques de France la définissent comme l’« Attitude de reconnaissance envers Dieu : l’homme “comblé de toutes sortes de bénédictions spirituelles dans le Christ” reconnaît de quel amour il est aimé de Dieu et l’en remercie. », https://eglise.catholique.fr/glossaire/action-de-grace/ (consulté le 05/10/2018). [3] D’un point de vue chrétien. [4] Sur le plan professionnel, familial, amical, matrimonial, etc. [5] Dieu médecin, Dieu justicier, Dieu avocat, Dieu magicien, Dieu banquier, Dieu devin, Dieu pompier, etc. [6] Cadeau. [7] Innocents, enfants, vulnérables, pauvres, handicapés, maladies, etc.(18)
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