Bois de Joie[:]

© Leander Syrieix.

© Leander Syrieix.

Alors que de plus en plus d’hommes et de femmes réclament des signes, des miracles ou encore demandent des réponses à toutes leurs questions, à vivre des expériences sensationnelles, recherchent la satisfaction de tous leurs besoins personnels, le christianisme, quant à lui, communique la croix, une aberration pour la société actuelle. Le christianisme parle le langage de la croix au cœur d’un monde modernisé et laïcisé. Cela ne nous rappelle-t-il pas un passage scripturaire ? : « Alors que les Juifs réclament des signes miraculeux, et que les Grecs recherchent une sagesse, nous, nous proclamons un Messie crucifié, scandale pour les Juifs, folie pour les nations païennes. » (1 Co 1, 22-23)

Pourquoi le catholicisme, ou de manière générale le christianisme est considéré par plusieurs personnes comme une absurdité, une folie, un scandale ? N’est-ce pas parce que ce qui en son centre est la « Croix » ou encore la proclamation d’un Christ mort et ressuscité ? En effet, il est de plus en plus difficile dans notre société d’accepter la souffrance comme faisant partie intégrante de la vie humaine. Les débats autour de la question de « la fin de vie », « mourir dans la dignité », « l’euthanasie », etc., montrent clairement que l’on a du mal a intégrer la croix, la souffrance, comme faisant partie de la réalité de la vie. Pourtant, une vie sans peine n’est qu’illusion. Par ailleurs, les séparations de plusieurs couples et les changements rapides de partenaires dans les relations amoureuses illustrent aussi le fait que l’on recule plus facilement devant les difficultés, l’on recherche plus la facilité.

Le christianisme proclame un Christ ressuscité et vivant à jamais. Or, l’on ne peut guère parler de résurrection en faisant fi de la croix. Dans le même sens, il n’y a pas de VIE sans mort. La croix est le signe de l’Amour, car « quiconque n’a pas souffert n’a point véritablement aimé ». La croix apparaît alors comme une source de joie, elle devient une étape incontournable de la réalité humaine. C’est de la croix que jaillit la vie, qu’émerge l’amour qui nous permet de mieux saisir le sens de la vie humaine. En effet, l’amour véritable n’est pas uniquement joyeux, cela connaît aussi des périodes de crise qui, une fois qu’elles sont traversées, permettent de savourer davantage les moments de joie. Plusieurs personnes engagées en couple peuvent témoigner de ce fait, car des moments difficiles survenus dans leur vie leur ont permis de mieux aimer ou de redécouvrir leur amour mutuel et vrai.

L’Amour du Christ pour le genre humain est passé par ce processus, car à travers ses gestes et paroles, il a manifesté son amour durant toute sa vie publique. Ensuite, dès le jardin de Gethsémani (ou des oliviers) jusqu’à sa crucifixion, il a traversé une crise, il a connu dans son corps et dans son esprit la souffrance. À la croix, le silence a pris place. L’on pourrait même imaginer que les quelques proches du Christ qui était au pied de sa croix ont vécu un temps de doute, d’incertitude, d’incompréhension qui les plongeait dans l’inconnu. Mais la joie qui a jailli au matin de Pâques leur a permis de comprendre ce qui s’est réellement passé à la croix. Ainsi, aimer la croix ne veut pas dire être masochiste ou doloriste, mais c’est accepter la réalité de la vie, car une vie sans croix n’est pas possible.

La croix, ce bois sur lequel le Christ a été crucifié est le symbole de la souffrance. Or, la souffrance est le passage qui mène à la VIE, à la joie de vivre. Alors, le bois de la croix est source de vie. La croix est ce bois de joie, une folie pour bon nombre de personnes aujourd’hui, mais sagesse pour toutes les personnes de bonne volonté qui l’accueillent inconditionnellement sans comprendre, sans l’expliquer, mais avec l’espérance de l’accomplissement d’une promesse : « “Il faut que le Fils de l’homme souffre beaucoup, qu’il soit rejeté par les anciens, les grands prêtres et les scribes, qu’il soit tué, et que, le troisième jour, il ressuscite.” Il leur disait à tous : “‘Celui qui veut marcher à ma suite, qu’il renonce à lui-même, qu’il prenne sa croix chaque jour et qu’il me suive…” » (Lc 9, 22-23)

© Léandre Syrieix.

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