L’amour manifesté dans l’instant présent

Credit : Daniel Abel Photograph

Is 9, 1-6 – Ps 95 (96) – Ti 2, 11-15 – Lc 2, 1-14 – Messe de la Nativité du Seigneur (C)

   

Il nous est déjà arrivé d’entendre ou de dire des phrases comme : (1) Vivre l’instant présent. (2) Profitons de l’instant présent comme si c’était le dernier car la vie sait nous rappeler ses dangers. (3) L’amour c’est maintenant ! Seul l’instant présent compte, etc. Et si l’amour était manifesté dans cet instant présent à travers la figure d’un enfant, pourrions-nous alors voir dans la fête de Noël la célébration de l’Amour de Dieu aujourd’hui et maintenant ?

La prophétie d’Isaïe, « Oui un enfant nous est né, un fils nous a été donné », se réalise dans l’Évangile de saint Luc, « Or pendant que [Joseph et marie] étaient là, le temps où elle devait enfanter fut accompli. Et elle mit au monde son fils premier-né ». Dieu accomplit donc sa promesse, il s’incarne dans le monde pour signifier son amour à l’humanité. Autrement dit, la Nativité de Notre-Seigneur est la manifestation de l’amour de Dieu. Par ailleurs nous savons que la naissance d’un enfant est précédée de neuf mois de grossesse, d’une longue période d’attente. Durant ce temps, l’enfant est espéré, désiré, etc. Les parents prennent toutes les précautions nécessaires d’ordre médical, spirituel, etc., pour s’assurer que l’enfant arrive dans de bonnes conditions. En situant la naissance de l’Enfant-Jésus dans ce contexte, ont voit donc que l’amour de Dieu se manifeste à l’humanité après un temps de gestation, après un temps d’attente. Cela signifie que l’amour est un don qui passe parfois par un processus, par un temps d’attente, par une maturation, par une préparation nécessaire. Elle jaillit donc de l’espérance. Dans les situations critiques actuelles où nous sommes témoins de tant de guerres, de tant de crises sociales, etc., les images de la gestation de l’amour et de l’attente peuvent nous aider à entrer dans un processus de construction de la paix, d’un monde meilleur, non seulement sur le plan personnel, mais aussi collectif, à travers une attitude et un réel vécu de l’espérance chrétienne.

« [Marie] emmaillota [l’enfant] et le coucha dans une mangeoire ». Nous pouvons visualiser cette scène à travers l’expérience de la visite d’un enfant que nous avons déjà visité. Il est si vulnérable, si beau, si doux et fait la joie ainsi que le bonheur de ses parents. Ainsi, pouvons-nous en dire autant de l’amour qui est si beau, si fragile, si captivant, si désiré, si attendu, source de joie et de bonheur. Il nécessite parfois un long processus à l’instar de la grossesse, mais est en même temps si vulnérable. Cette comparaison peut nous inciter à transformer notre regard sur l’amour, à mieux ajuster nos relations interpersonnelles en prenant conscience qu’elles prennent parfois du temps pour être établies, mais sont en même temps si fragiles. La figure de l’enfant à sa naissance employé pour exprimer l’amour vise à appuyer le fait que Noël c’est en quelque sorte la célébration de l’amour de Dieu pour l’humanité, que c’est la fête des plus petits à l’instar les enfants, les vulnérables entendus comme les malades, les oubliés, les isolés, les victimes de tout genre de pauvreté et de fléaux, etc. Imaginons les parents devant leur enfant nouvellement né, tout épris et en admiration ! Joseph et Marie devaient sans doute être dans cette attitude devant l’Enfant-Dieu emmailloté. Comme eux, en cette nuit de la Nativité du Seigneur, nous pouvons nous laisser envahir par la même énergie, la même attitude non seulement envers nos enfants, mais aussi envers tous les plus petits précédemment nommés.

L’amour de Dieu pour l’humanité est actuel, se manifeste dans le moment présent : « Gloire à Dieu au plus haut des cieux, et paix sur la terre aux hommes, qu’Il aime ». Ainsi, Il aime l’humanité et la lui exprime en se donnant par un enfant. Ce geste d’amour se réalise en cette nuit, à ce moment-ci, dans l’instant présent, et s’actualise au quotidien dans toutes les sphères de notre vie à travers la figure de nos enfants, des plus petits déjà évoqués qui croisent nos routes. Ainsi, c’est par l’amour qui n’est pas épuisé et qui s’inscrit dans la réalité humaine que Dieu se donne. En ce sens, l’instant présent entendu comme « l’instant divin » est le temps par excellence où se manifeste l’amour de Dieu pour nous. Autrement dit, c’est une invitation concrète lancée à chacun de nous aujourd’hui pour accueillir cet amour divin à travers la figure de l’enfant, dans celle des plus petits. Poser un tel geste peut consister à ouvrir grand nos bras pour les embrasser, les accueillir non seulement dans leur vulnérabilité, mais aussi dans ce qu’ils nous révèlent de Dieu. Et si nous osions, ici et maintenant, nous tourner vers nos proches voisins pour les embrasser, échanger avec eux un sourire, un regard de tendresse, poser un simple geste de bienveillance ?

Puissions-nous donc en cette nuit de Noël, instant présent où Dieu nous manifeste son amour de diverses manières, nous laisser émerveiller par sa beauté, par sa splendeur, par sa fragilité et ouvrir grand nos bras sans aucune crainte, car en cette nuit commence à se réaliser « la bienheureuse espérance : la manifestation de la gloire de notre Dieu et Sauveur, Jésus Christ. »

© Léandre Syrieix.

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