« Nouvelle » Évangélisation[1] ?[:]


 
Parler de la « Nouvelle » Évangélisation c’est prendre en compte toutes les pluralités culturelles, la diversité religieuse… C’est le cas par exemple à Marseille, Beyrouth etc. où le concept « Nouvelle » Évangélisation peut être ambiguë.

Parler de « Nouvelle » Évangélisation est-ce Marketing parce que c’est nouveau? Est-ce que cela signifie qu’il n’y avait pas d’Évangélisation avant ? Qui y a-t-il derrière ce mot ? En quoi est l’urgence dans ce mot ? L’expression peut prêter à confusion.

C’EST QUOI ANNONCER L’ÉVANGILE ? On peut distinguer trois moments logiques et chronologiques lorsqu’on parle d’annonce de l’Évangile :

1.   Prendre au sérieux

Il faut prendre au sérieux la réalité à laquelle on s’adresse, la situation présente. On ne peut comprendre la « Nouvelle » Évangélisation si elle n’entraîne pas un discernement dans la situation d’aujourd’hui. La société actuelle est marquée par une très grande désaffection par rapport au religieux. Au Québec elle est encore plus marquée, tout comme dans l’ensemble de l’Amérique du nord et biens d’autres grands pays Européens. On ne peut s’en sortir en disant qu’elle est mauvaise ou inutile. Aujourd’hui, il n’y a pas seulement une indifférence à l’égard du christianisme, mais aussi un Désaveux par rapport à la façon d’apporter l’Évangile ou la façon par laquelle elle a été apportée. Ce n’est pas pour rien que le Pape Benoit XVI a parlé à plusieurs reprises de « Purification » dans le cadre du synode des évêques du monde entier sur la « Nouvelle » Évangélisation.

Cette désaffection laisse comprendre :

1.1      L’expérience de la Pluralité

Qui n’est pas seulement la présence de plusieurs religions, mais aussi la relativisation de plusieurs religions. L’expérience d’une pluralité quotidienne renvoie à cette relativisation de toutes les religions. Quelle est la légitimité de la religion que nous confessons ? Est-elle vraiment légitime ? Prendre au sérieux la « Nouvelle » Évangélisation, c’est prendre en compte cette réalité.

1.2      Un intérêt pour la dimension de la vie pour ne pas dire pour le religieux

Il serait utile aujourd’hui de redévelopper la culture, de se donner les moyens pour qu’il n’y ait plus une déshumanisation de la société.

Prendre au sérieux ces différents points, c’est avoir conscience qu’on n’a pas la prétention à tout. C’est purifier sa propre confession religieuse, c’est une démarche de conversion.

2.   Prendre du recul

Non seulement prendre du recul, mais aussi situer la « Nouvelle » Évangélisation dans la dimension Missionnaire de l’Église. Prendre du recul c’est finalement reprendre les métaphores de l’histoire de conscience missionnaire de l’Église en trois principaux temps :

  • Temps de dilatation : on voit cela dans les premières communautés comme chez Tertullien ou Origène. Le mot « Mission » n’apparaît pas à ce moment précis.
  • Temps de l’osmose : ce temps est celui entre la figure de la religion et de l’organisation sociale de la chrétienté (environ 4ème siècle).
  • Temps des missions lointaines : vers la fin du 15ème siècle où on s’aperçoit qu’il y a de nombreuses population qui n’ont jamais reçues la Bonne Nouvelle, c’est le cas avec les explorations.

On passe « des missions » à « la mission », c’est-à-dire de ce que fait l’Église lorsqu’elle envoie des missionnaires à travers le monde avec toutes ses ambiguïtés (Missions, colonisations, guerres de religion…) et l’introduction de la mission Ecclésiologique.

Il y a une greffe de la « théologie de la mission » sur une « Nouvelle théologie de la révélation ». Le point le plus saillant de cela est le texte du Pape Paul VI du 6 Avril 1964 sur « Ecclesiam Suam[2]» Cf. N°72, 73…, la révélation est un engagement de Dieu sous forme « dialoguale », ainsi, la mission de l’Église consiste à s’articuler sur celle de Dieu et doit par conséquent avoir un geste « dialogual ». La mission n’est donc pas un geste de l’Église, mais celui de Dieu envers le monde.

Servir, c’est adhérer de paire avec la redécouverte de l’Esprit-Saint. Lorsqu’ on prend conscience de cette façon de voir la « Nouvelle » Évangélisation, on prend conscience de la coopération à la mission de l’Esprit-Saint.

Il y a une relation entre « dialogue » et « annonce ». L’expérience du dialogue nous donne de comprendre peu à peu que si nous faisons confiance à ce que l’autre nous dit de Dieu à travers son expérience personnelle, sa confession religieuse ou sa croyance différente de la nôtre, nous comprendrons que Dieu est plus grand que ce que nous avions comme idée de Lui. Le fond de l’expérience de Dieu c’est d’abord la spiritualité. L’expérience du dialogue nous décentre de ce que nous portons et nous lie à ce dont l’autre est porteur. Elle[3] nous éclaire sur ce dont nous avions et suscite ainsi une meilleur et nouvelle compréhension. La réalité du dialogue comme levier d’une meilleur compréhension de ce qu’est la mission de la « Nouvelle » Évangélisation est présenté de façon plus explicite à travers la « conscience » du missionnaire qui s’en va dans une nouvelle terre de mission où tout lui est inconnu, où il devra tout apprendre de ceux vers qui il est envoyé (s’inculturer) et se rendre compte au final, qu’il reçoit plus qu’il venait apporter.

Quand on prend le recul, on fait également une analogie entre les évènements du passé et du présent.

3.   Prendre position

Prendre position est l’idée qui se trouve derrière le terme « Nouvelle » Évangélisation. L’un des enjeux de cette « Nouvelle » Évangélisation serait la revalorisation de la liturgie, et donc du dialogue social.

  • Prendre position sur le mode de la résistance : tant que l’on réduit une religion aux valeurs on concoure à sa perte, car c’est une aventure spirituelle qui doit accompagner toutes les questions religieuses. Le Christ est venu faire avec nous l’expérience de la vie et non nous enseigner sur ce qu’est une religion particulière, ou encore nous enseigner sur des valeurs. On doit résister sur l’idéologie de la tolérance à laquelle est souvent réduit le terme « dialogue inter-religieux». Cette idéologie anéantit et assouplit le potentiel de critique et le prophétisme des religions. Nous devons donc prendre position par rapport à ce qui anesthésie le capital des religions et plus particulièrement du christianisme aujourd’hui.
  • Prendre position sur le mode de proposition nouvelle ou renouvelée de l’Évangile : il ne s’agit pas seulement de résister comme évoqué précédemment, mais aussi de « faire » des propositions. On arrive ainsi à des choses à la fois simples et différentes :

                    – Proposer l’Évangile en commençant par la reconnaître déjà à l’œuvre. Le Christ lui-même exprime dans l’Évangile qu’il n’a pas la maîtrise par rapport à ce qu’il annonce. L’exemple qui illustre cela est sa surprise face à la Foi de la cananéenne. Nous devons ainsi travailler au discernement.

                      – Vivre l’Évangile et le faire passer dans le vécu à travers l’ « amitié » qui respecte les personnes.

                    – Proposer l’Évangile en le confiant, car confier c’est donner et ne pas savoir ou prétendre savoir les fruits, c’est abandonner.

                      – Proposer l’Évangile en le priant



[1] Article rédigé à partir de la conférence publique de l’Ab. Jean-Marc Aveline Directeur de l’Institut catholique de la Méditerranée et vicaire général du diocèse de Marseille le 05 Novembre 2012 à la Faculté de Théologie de l’UL.

[2] Voir « Ecclesiam Suam», N°72, 73…

[3] L’expérience du dialogue

 

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